OUI, ça fait longtemps que j’ai pas écrit. Alors j’en colle une tartine pour compenser.

Visiteuse, visiteur, d’où que tu viennes, permets moi de te tutoyer car si tu viens lire ces lignes, c’est que tu viens participer à une partie de mon intimité. Et comme je veux bien la partager avec toi, et qu’on va être pote pendant quelques lignes, autant se dire « TU » tout de suite, enfin, « JE » plutôt puisque c‘est moi qui raconte, spectateur de mes délires.

Ami lecteur, je tiens aussi à te préciser que la chronologie peut parfois ne pas être exactement respectée. Ne m’en veut pas, la mémoire défaille et je jette tout comme ça vient. De toute façon, c’est pas pour faire un livre que j’écris ou alors va falloir que je fasse broderie autour d’un sujet banal.

Une partie du texte relatif à certains évènements a été volontairement occultée. On est juste pote de lignes. Si tu fais partie de ceux qui en savent trop, tu sais ce qui est arrivé, inutile de te le rappeler. Désolé pour les autres, je garde un peu d’intimité (quoiqu’après la relecture du texte ….).

Le 15 juillet, ça fera un mois. Un mois de quasi-silence radio sur le net, au téléphone ou tout autre moyen de communication ou presque.
La raison tient en un mot : CLINIQUE. La cause : addiction aux médocs entre autre parmi toutes les raisons que mon cerveau pourrait trouver. Une autre raison possible reste une grande dépression qui nécessite une trop grosse quantité de médocs.

Cette clinique là, mon gars ou ma garse (oui, c’est pour féminiser, pour les filles qui lisent et qui ne sont pas des garces), c’est pas la clinique du bonheur sur le pré, c’est pas celle non-plus celle où tu sors faire tes courses entre les nuits. C’est une Clinique PSYCHIATRIQUE ! Ca y est, le mot est laché.

Dès que tu franchis le seuil de la porte de l‘accueil, réfléchis bien car tu ne pourras pas repasser dans l’autre sens avant un minimum de trois jours. Il faudra aussi attendre 10 jours au moins avant d’espérer pouvoir foutre tes pieds en dehors de l’enceinte (c’est pas une prison non-plus). Et tes premiers pas dans le grand espace du dehors se feront accompagnés d’un garde du corps (on peut dire « infirmier » aussi, suivant la taille du garde du corps).
Tu es un peu perdu, tu te poses 50 000 questions lorsque tu patientes dans la salle d’attente. Pourquoi je suis là ?Que va t-il se passer ? Je ressors dans quel état ? Je reste ici combien de temps ? Et il y en a plein d’autres du même genre.

A vrai dire, 3 semaines après mon « incorporation », je ne me souviens presque plus du début. Un bureau, deux signatures puis une infirmière qui me fait faire tout le grand tour de tous les recoins du bâtiment, l’arrivée dans ma chambre puis plus rien.
J’ai fait abstraction de mon arrivée et mes souvenirs recommencent à « je fais parti des meubles depuis un moment déjà ».

Je ne me plains pas, c’est moi qui ait voulu venir. Depuis des années à bouffer des antidouleurs pour soulager le dos avant que je me transforme en Robocop. Puis les autres années ou les douleurs physiques étaient causées par le corps en « manque ». Alors tu t’enfermes, tu te shootes à la codéine, ton état descend, le moral baisse et les douleurs psychiques s’invitent au bal.

Puis un jour on te dit qu’un petit anxiolytique pourrait t’aider à supporter ces douleurs là. Alors tu en croques un. Ca fait du bien, ça soulage et tu te sens un peu mieux. Mais c’est sournois ces bêtes là. Dès que le moral baisse, un Mars et ça repart ! Sauf que dans ce Mars là, il n’y a pas de chocolat que c’est vendu par boite de 30 (t’en connais beaucoup des boite de 30 Mars ?) et que ça s’appelle Xanax ! Non, c’est pas une terrible guerrière ou le nouveau système galactique à la mode, c’est juste un poison qui te fait croire que, mais en fait NON. C’est comme l’alcool. Avec l’ivresse tu te sens mieux, mais la gueule de bois qui suit te ramène à une dure réalité.
Mais comme Xanax te soigne, Xanax devient ton pote. Et comme tu l’aimes ton pote, tu deviens dépendant de lui, tu deviens plus que copain, c’est presque un frère Xanax.

Lentement, mais sûrement, il vient s’ajouter à sa copine codéine. Heureusement que morphine est partie depuis quelques années avec l’opération sinon il y aurait eu surnombre.

Tu te dégrades sans t’en apercevoir. Ta mémoire te joue des tours. Tu as 3 choses à prendre au magasin du coin et ça devient un miracle si tu as les 3 en revenant. Tu rentres avec 2 c’est déjà bien. Si tu as les mains vides, c’est que tu as carrément oublié de partir faire les courses. Rigoles pas, ça arrive aussi.

Et ces petits riens s’ajoutent au reste. Tu deviens anxieux, tu dors mal ; et pour ça aussi on a la petite pilule miracle. Elle s’appelle Atarax ! Xanax et Atarax sont dans un bateau …

Au début, Atarax vient juste te voir le soir pour t’accompagner vers Morphée. L’état psychique se dégradant, Morphée répond de moins au moins au téléphone. Pour ça aussi, il y a un miracle de l’industrie pharmaceutique. Quand tu as essayé plusieurs trucs et que ça t’aide plus il y a Imovane. C’est une copine qui s’invite et qui a des bras plus musclés pour t’emmener voir Morphée.

Et puis il y a des événements extérieurs qui s’ajoute histoire de t’en recoller une couche au moment ou tu n’en a pas franchement besoin. Des trucs ou tu te dis ENFIN je vais respirer, vivre mieux, des trucs que tu n’espérais plus qu’en rêve depuis longtemps et tous les plaisirs qui vont avec et toute te retombe sur la tronche avant même d’avoir gouté au petit morceau de bonheur que tu devais recevoir. Mais ça tu gères pas ; tu peux pas gérer le Monde. Alors tu encaisses, enfin, tu essayes d’encaisser mais tu n’y arrives pas. Il y a des choses qui passent quand même. Mes photos restent bonnes, celles des mariages que je fais sont même meilleures que celles de l’année dernière. Et dans ces moments là, de bon stress, de moteur de la vie ou des moments de paix, tu oublies tes médocs. Tu n’as plus besoin d’eux, tu peux les envoyer au diable. Mais c’est des amis sournois qui rappliquent au galop. Dès que la pression baisse, tu t’écroules et tu replonges.

Et si tu rajoutes dans l’équation « horaires de malade », « boulot de fou » pour finir par gagner 10 fois moins qu’un smicard en bossant 2 fois plus, le mental fatigue, le corps fatigue. 4 ou 5 heures par nuit forcément, ça use. Le physique ne suis plus, le mental ne suis plus et tu ne peux pas compter sur tes neurones qui sont parties avec le troupeau de médocs.

Et quand tu t’aperçois que tu gères plus rien du tout y compris ta vie, c’est tes amis chimiques qui s’en occupent. Effexor vient alors t’aider. Avec Effexor tu es plus fort (cadeau les gars pour le slogan). Mais il faut attendre plus d’une semaine pour qu’il se mette à bosser lui ; fainéant !
Ca y est tout est bon ? Enfin ? NON ! Il y a migraine qui arrive. Pas la petite que tu te couches dans le noir trois heures avec un antalgique et c’est fini ; celle-là est plus sournoise. Elle reste à la limite de l’intolérable mais elle est là 24 heures sur 24 ! Tu descends des boites d’ibuprofène comme certains prendrait des vitamines. Vendus par boite de 12 cachets de 400 milligrammes (le 200, c’est pour pisser dans un violon), tu descends 2 ou 3 boites par semaine. C’est surdosé, je le sais, mais j’ai mal. Et au point où j’en suis, je ne suis plus à ça près. J’ai supporté la douleurs du dos pendant des années et appris à vivre avec, mais la là, j’ai mon compte. Le quota attribué à la fonction « douleurs » est épuisé depuis un moment.

Tu rajoutes encore d’autres événements extérieurs qui te tombent sur la gueule, des trucs que t’avais pas prévu, mais vu qu’il était écrit que tu n’aurais pas la paix ou quelques instants pour respirer ; mais c’est pas grave tu gères déjà plus rien. Bonne année qu’on se dit le 1er janvier. Depuis le début 2010 j’accumule les merdes. Des trucs qui font mal au coeur et au cervau et crash en kart, épaule écrasé. Plus de sport. Les muscles fondent. Les défenses immunitaires passent aux abonnées absentes. Je me choppe un truc hasmatiforme ! MOI ! À 40 balais passé ! Une première ! Ventoline rejoint ses copines. Et tu crois que c’est fini ? Et bien NON. Sinusite déboule au galop. Une première aussi.
OH, c’est pas fini ce bordel ?????
Radio du crâne, scanner (pour voir s’il reste des neurones ?). Rien ! Enfin, RIEN, c’est « pas de bobos », il reste quand même des neurones qu’il n’y ait pas confusion.

Là, le docteur sort la carte « Centre Médico Psycho », pas loin, gratos et pas mal. Vu mon état, je prends. C’est pas mal, ça fait du bien, mais ça reste très éphémère. Une fois sorti, ton mal être te retombe dessus. Et on augmente les doses. Pas pour te shooter à mort, juste pour que tu puisses vivre un peu quelques instant tranquille, respirer un peu et te sortir de cet état de stress intense dans lequel tu survis 24 heures sur 24. La photo reste un exutoire sans médoc. Je m’y vautre le plus possible, ça fait du bien et la qualité augmente encore. OUF, au moins un truc qui fonctionne ici !

Alors vient le moment ou pour survivre, puisqu’on ne parle plus de vivre, tu croques 8 anxiolytiques (pour les connaisseurs : 4 Xanax 0,50 mgr et 4 Atarax 0,25 mgr), 3 antidépresseurs (pour calmer le cerveau, Effexor 75 mgr), 3 machins d’ibuprofène 400 et ta copine Imovane par jour, les dernières neurones saines d’esprit qui restent dans ton cerveau envoient un signal d’alarme. Ca va, z’êtes pas trop à la bourre ?
Tu es shooté, ça se voit même pas et les neurones font leurs courses tranquilles.

Puis vient le psychiatre. Moi, chez un psychiatre ; la vache, j’ai pris une gamelle ! Et lors de l’entrevue il me sors le mot CLINIQUE. Il y en a une qui est pas mal, paraît-il, pas très loin et prise en charge par la mutuelle. Moi qui n’avait pas de carte Vitale avant car j’étais jamais malade ou alors une aspirine et ça repars, depuis que je l’aie reçue en 2002 elle à chauffé ! Pire qu’une Carte Bleue un jour de soldes ! C’est pas bien la carte Vitale, ça rend malade. Je vais finir par le croire.
On prépare le dossier à la clinique, je les appelle, il y a une commission qui statue, il faut de la place, etc …. Il faut compter au moins une semaine. Bon on va faire avec.
3 heures plus tard le téléphone sonne ; la clinique à l’appareil. « Vous pouvez venir dès demain ? ». Euh, bien, j’ai pas trop prévu le truc, il y a rien d’organisé, panique à bord, « je vous rappelle tout à l’heure ». Une demie heure après ma place était réservée, comme à l’hôtel.
Chic, d’après la plaquette que j’ai vu, je me fait un programme du genre psychologue le matin, salle de sport l’après midi ; tous les jours, ça devrait aller. Bon en fait le psychiatre juge que j’ai pas besoin de la psychologue (j’aurais aimer en juger par moi-même) et la salle de sport est pas mal squattée. Aïe, ça va être dur.

Et par un habile retour des choses, je te ramène au début du texte après mes trois semaines de, euh, …. truc !

Rapidement on t’attribue une place au réfectoire. Elle sera mienne pendant la durée de ton séjour. Moi qui suis passé en mode « OURS solitaire », je me promène lentement histoire de prendre des marques dans ce territoire inconnu. Bon j’en suis pas encore à pisser contre les arbres et les murs non-plus.

Je découvre des gens. Je fais rapidement connaissance de quelque personnes, c’est mon côté sociable qui reprend le dessus. J’en apprends vite sur cette clinique histoire de savoir un peu dans quoi je m’embarque. Certains sont là depuis longtemps, d’autres en sont à leur quatrième séjour. Aïe, ça commence mal, j’peux aller voir un psy ? Les raisons de leurs séjours ? Presque tous sont là pour les mêmes motifs : dépressions dues à une dépendance liée à l’alcool, au médocs ou une dépression tout court. Il y en a de type « 2 de tensions » d’autres avec 3 neurones, etc …. et ces gens là, tu les jugent pas.
Des hommes et des femmes que t’aurais même pas calculé quelques temps plus tôt, limite un regard dédaigneux, et bien c’est gens là, soudain, tu les juges pas. Tu les regarde et ils te rendent ce regard. Un vrai miroir. Et toi tu arrives dans leur univers et ils ne te jugent pas non-plus. Et je comprends rapidement pourquoi : ils sont ici, comme moi, dans la même merde. Chacun la sienne et ses raisons mais le dénominateur commun est la merde dans laquelle on est. Celle qu’on a pas vu venir, celle qui nous a pris en traitre, celle avec laquelle on vit depuis plus ou moins longtemps, mais tous dans la même. Une foutue dépendance à un truc qui nous a pourri la vie.

Je communique et découvre qu’il n’y a pas besoin de s’étaler sur ses soucis comme avec un psy car, les soucis, sont aussi les mêmes. Les dialogues sont faciles. Tout le monde se tutoie et s’appelle par son prénom. Le temps et l’ambiance délient les langues. On écoute, on s’encourage, on essaye de trouver les mots justes quand il faut. C’est bien.

Le personnel est également bien. Oh, il y en a toujours un ou deux pour faire la gueule tout le temps, mais les autres sont biens. A l’écoute, on peut parler du moindre soucis ou autres et on réajuste un traitement en fonction.

On trouve le temps long chaque jour. Quelques activités comme la menuiserie, le ping-pong ou autres aident à faire passer le temps. Mine de rien après chaque semaine passée, on voit que le temps passe vite.

Pas d’ordinateur ou alors un accès à internet deux fois une demie heure par semaine. Moi qui passe presque toutes mes journées d’habitude devant un écran, c’est le choc. Alors, au bout d’un moment on découvre le monde parallèle de la clinique. Beaucoup sont venus avec des ordinateurs portables ou des téléphones avec accès à internet. J’suis une buse, le mien à un accès à internet. Bon avec la résolution de 320 par 240 pixels, c’est un peu juste, et le mini clavier ça fatigue les doigts au bout d’un moment. Ça permet de garder le contact avec les proches. J’envoies des SMS par wagon entier.

Les bouilloires tournent dans les chambres pour éviter d’enrichir la machine à café. La superette locale permet d’améliorer l’ordinaire et de combler certaines lacunes (nul n’est parfait). Le petit morceau de pain au petit déjeuner, je comprends que ça puisse caler une ou un jeune anorexique de 45 kilos. Mais pour certains gabarits comme moi, c’est un peu juste.
La résistance s’organise. Ceux qui ont le droit de sortir font les courses pour ceux qui ne peuvent pas. Quelqu’un a besoin d’un truc ou d’une info, il l’a rapidement. Une vraie entraide limite familiale. On vit tous ensemble alors on peut se comparer à une famille; les départs des uns sont souvent fêtés à grand coup de gâteaux et de ……… Coca, jus de fruit et eau ! Pas d’alcool, normal. Ces fêtes sont pas vraiment encouragées dans le règlements mais le personnel, voyant que ça se passe bien et que ça nous met un peu de baume au cœur, nous laisse faire. On abuse pas non-plus, une histoire de respect mutuel.

Mais la plupart du temps, je m’isole. Je ne suis pas devenu agoraphobe, mais c’est mon côté ours solitaire. L’ours polaire et les autres animaux du grand Nord hibernent quand le grand froid arrive. J’ai inventé un nouveau mot : moi, j’éterne ! Cherchez pas dans le dico, l’Académie Française n’a pas encore traitée ma proposition. Il faut trop chaud, je passe en mode veille. Bon, je n’arrive pas encore à dormir plusieurs mois d’affilé sans manger, mais je plonge mes yeux dans des lectures plus adaptées : Mike HORN et BORGE OUSLAND au Pôle Nord en pleine nuit (lu pour la 6 ou 7ème fois), Laurence de la FERRIERE et sa traversé de l’Antarctique (en deux livres, ça fait plus à lire), et une tripoté d’autres bouquin. J’apprends qu’on peut se faire livrer des colis; j’en profite pour passer quelques commandes et gérer mon stock de matériel et j’en profite pour me faire livrer des livres. J’ai dévoré celui de Nadir DENDOUNE (Un Tocard sur le Toit du Monde). Un gars du 9-3 qui avec très peu d’expérience au départ et un peu de tchatche s’est attaqué, pour sa première expérience d’alpiniste, à sa majesté l’Everest ! Arrivé le matin par la Poste, je plonge dedans, le style est très sympa et facile à lire ; le soir même j’arrive au sommet avec lui. Il aura pas fait de profit le bouquin. Un livre, une journée ! Comme j’aime son écriture, je commande les deux autres qu’il a écrit .Les autres je les connais déjà, je peux les savourer lentement. Et puis il traine deux gros pavé sur une traversée de l’Afrique par Sonia et Alexandre POUSSIN (Africa Trek 1 et 2). 14 000 km de marche, 1300 pages environ, je verrais plus tard. Il fait trop chaud pour attaquer un bouquin aussi volumineux sur un continent pas franchement réputé pour son climat tempéré.

Visite du médecin psychiatre tout les matins. Celui qui s’occupe de moi est également le directeur de la clinique; Sec, droit, ponctuel, bien habillé. J’aime.
Dès le premier jour, je suis arrivé avec un stock de codéine et dès le premier jour, je ne prends pas. Dès que les douleurs se réveillent, je vais marcher ou aller dans la salle de sport faire un peu de musculation pour que les douleurs ferment leur tronche ou alors quelles l’ouvrent pour une bonne raison. Foutue épaule, dur dur sur le banc de musculation Les jambes vont bien. Après quelques échauffements je colle la charge à 50 kilos (le maxi ici) et au bout de quelques minutes je la soulève avec une seule jambe plusieurs fois, puis l’autre. Ca c’est un message subliminal pour les sportifs qui trainent ici. Vous avez un élément de comparaison avec ce que peuvent endurer mes jambes. Je marche vite, mais dès que c’est en montagne, je suis un vrai diesel : lentement, sûrement avec un paquet de puissance en plus.
Je demande l’autorisation de me faire livrer des gros pneus et un harnais pour en chier en traction. Refusé ! Bon faut dire que je dors déjà par terre sur un matelas autogonflant de rando à cause de leur lit qui me bousille le dos, je vais pas abuser non-plus. « euh, dites, docteur, pour la chambre, ça vous dérange si je colle la tente dehors ? » ; phrase de détente.

Un jour de canicule avec une température de plus de 30°C, je craque. Je chausse les pompes de trail (Montrail Continental Divine pour les curieux), je commence à faire un aller retour entre un bout du parking et la grille d’entrée. J’ai pas mesuré la distance, mais la côte depuis la grille m’aide à monter en charge sur le cœur. J’ai bien sûr pris le cardiofréquencemètre et de la boisson isotonique avec moi. Pas fou non-plus le garçon. J’accélère le rythme de marche et commence à courir et …. Retour par la case chambre pour changer de pompe, les Montrail ne sont pas prévu pour courir sur le bitume. Je chausse les chaussures adaptées (Mizuno Wave Nirvana 4 pour les mêmes curieux). Je marche, je cours, j’accélère, je ralentis. J’alterne en fonction de ce que me dit mon cardio, mes sensations et mon souffle. Je dois passer pour un grand malade ; alors que tout le monde souffre à l’ombre, il y a un crétin qui court en plein soleil.
Après beaucoup de sueur et d’effort (j’en ai chié quand même), j’ai cramé plus de 1400 calories en 3 heures. Ca fait du bien.

La chaleur. Il y a celle qui suffoque, palpable. Et il y a l’autre, plus vicieuse. Avec de telles températures, forcement les vêtements raccourcissent. Les jupes sont de sortie et perdent des centimètres, les décolletés aussi et, avec l’abstinence (non pas de rapports dans la clinique), c’est les hommes qui, du coup prennent des centimètres. Mon mode ours me permet de gérer. Fin de la parenthèse osée.

La tête part en sucette mais le corps recommence à répondre. Par contre les médocs t’assèchent comme une carpe en plein soleil. La lecture, la solitude et le sport me serviront pour que mon corps puisse envoyer du positif au cerveau en espérant que ce dernier suive.

Comme je suis un garçon bien sage et que j’estime que les infirmiers ont déjà assez de soucis avec les gens qui en ont plus besoin que mois, je me tiens tranquille en faisant mes trucs et j’obtiens l’autorisation de tueur : sortir au bout de 9 jours (et non pas 10 comme le stipule le règlement) sans garde du corps ! La classe. J’aurais pu faire mon crâneur avec mon Visa pour dehors, mais c’est pas la peine. Certains souffrent ici de ne pouvoir sortir pour des raison de santé encore fragile pour ne faire qu’une petite balade d’une heure, inutile de leur coller au visage ma « perm » de quatre heure. Ca aurait été malvenu et incorrect vis-à-vis de tout ceux qui sont là. Il me claque pas à la gueule leur perm de 8 heures d‘affilé. J’en profite pour aller dans un magasin de sport. Inutile de préciser pour ceux qui me connaissent ou qui font gaffe aux fringues, à part les costards, pratiquement tout vient de la même chaine de magasins.

J’en profite pour demander aussi une perm de 10H00 à 18H00 pour mon onzième jour, il faut dire que j’ai un mariage à photographier. C’est mon seul revenu pendant mon séjour et il faut que j’équipe un peu mon camion, futur camping car et compagnon de crapahute.
THE soucis est que le vin d’honneur est à 18H00 à plus de cent bornes de la clinique. Je préviens le médecin en lui montrant mon « ordre de mission » que j’ai pas le don d’ubiquité. Il m’autorise une heure de plus et devant ma moue dédaigneuse (je fais très bien la moue dédaigneuse), il me dit, fait au plus vite. Ce jour là, exceptionnellement, je ne trierais pas les photos avec Laurent, the boss of the boutique photo (voir autre article pas très loin en dessous). Je jette mes cartes, prends le volant (c’est maman qui conduit depuis le début de la journée et son allure pas très rapide me stresse un poil), GAZZZZZZ direction la clinique pour une arrivée à ………… 23H00 ! Bien joué mon gars, pour une première, quatre heures de retard, c’est pas mal. Autant dire que j’en mène pas large le lundi matin quand il vient me voir. Facile de deviner à son regard, son prochain sujet de conversation.

Je navigue entre la patios « fumeurs », ma chambre, la salle de sport et les couloirs. On a vite faire le tour et tout le monde cloppe à mort. Même moi qui en fumait deux le soir, un paquet de 30 me fait à peine trois jours.
Alors je marche pour épuiser cet autre poison. Le personnel commence à reconnaitre mon pas : puissant et rapide. Je marche toujours très vite et ça s’entend. Je crache mes cloppes et profite de chaque perm que je prends (pas beaucoup en fait) pour faire un grand tour du coin en forçant sur les guiboles.
L’épaule gauche reste encore douloureuse.

Le personnel est toujours aussi sympa, ça aide. Les personnes chargées de l’entretien des chambres le sont aussi. Pas facile pour elle comme boulot, alors je sors de ma chambre pour les laisser tranquille et ne pas être dans leurs pattes. Je déteste quand on me colle aux basques, je pense que cela doit-être pareil pour elles ; alors j’essaye à mon petit niveau de ne pas les gêner. J’essaye d’imaginer leur journée avec plus de 80 patients collés aux pompes, ça doit les gonfler sévère à un moment. J’obtiens toujours un sourire et un merci, c’est cadeau et ça fait aussi du bien.

Et les médocs dans tout ça. Plus de codéine, sauf si besoin. J’en abuserais pas. Le lendemain de mon arrivée un infirmier me suggère d‘enlever un médicament car il le trouve trop proche de la prise suivante. Je suis d’accord, ça en fera un de moins. Les migraines continuent. Par contre j’en chie pour avoir 400 milligrammes d’ibuprofène quand j’en ai besoin puisque je suis au-delà des doses prescrites. Pendant deux jours, je planquerais une boite dans ma chambre. La démerde, la démerde.
Lors d’une séance de brainstorming avec le médecin psy (toujours très à l’écoute et très compétent, ce que son personnel reconnait volontiers) on découvre soudain une cause possible de mes migraines. C’est un effet secondaire de ce salopard d’Effexor qui, dans quelques cas et surtout chez des migraineux, provoque ces céphalées. ZOU, 3 cachet d’antidépresseur en moins. On teste sur plusieurs jours mais au bout de 3 il ne reste qu’une légère migraine largement supportable, elle disparaitra par la suite. Bon il m’en recolle un plus léger dans la foulée mais avec un seul cachet le soir (au lieu de trois).

Au 9 juillet, je suis rentré avec le troupeau de médocs sité plus haut. 3 semaine après, j’ai baissée ma dose d’antidépresseur par 6. Je tourne à deux cachet maxi de codéine quand j’ai vraiment mal. 1 ou 2 ibuprofènes aussi par semaine, mais ces plutôt des mots de tête, et pas des migraines, dus à la chaleur.
Mon pote Atarax est resté au même dosage, on peu pas tout diminuer d’un coup surtout quand le traitement a déjà quelques années.
Quant à Xanax, je lui ais un peu cassé la gueule. On est passé de 2milligrammes (4 de 0,50mgr) par jour à 1,25mgr par jour soit presque la moitié.

J’ai toujours l’impression d’être sur un fil avec la facile chute du côté obscur mais à force de jouer l’équilibriste, je deviens meilleur et la corde s’élargie.

Côté ambiance c’est toujours sympa, j’aime bien. Je suis pas le seul ours solitaire, il y a même des oursEs solitaires.
On se rend compte après plusieurs semaines qu’on ne peut pas définir un profil type. On va du retraité au jeune cadre dynamique, de l’employé au chef d’entreprise, de celui qui bosse dehors à celui qui est dans un bureau toute l’année, sans oublier les insomniaques, etc…. On est un peu un rassemblement de tout le monde. On est NOTRE Monde.

Le 10 juillet, je pars couvrir un autre mariage. Comme il n’y a pas de photos le matin, j’ai obtenu de décaler la perm de 11H00 à 19H00. Après le vin d’honneur, je fonce au magasin donner les cartes à Laurent et je me sauve. Je sens que je vais rentrer en retard à la clinique . Pourtant tout est organisé d’avance. Ca me frustre un peu d’ailleurs de ne pas faire comme d’habitude le tri des photos avec Laurent car j’aime ça et je note chaque critique pour être un peu meilleur chaque jour. Et ce soir là, je rentre à …. 21H00 ! Encore à la bourre.
Le lendemain, je tombe sur une espèce de machin soi-disant médecin-psychiatre qui remplace le mien pour le week-end. J’ai déjà passé une journée hyper stressant la veille, j’ai tourné avec tout mes médocs et même « chargé » c’est limite hors de contrôle dès que mon œil quitte le viseur de l’appareil.
Donc ce lendemain, je suis encore en état de stress intense et le machin qu’à pas dû lire mon dossier arrive en jouant le maitre d’école face à un gamin de 10 ans qui a fait une connerie. Ce jour là, je crois qu’il peut remercier mon cerveau en vrac car avec 3 neurones de plus, il serait sorti de ma chambre avec le chariot dans la gueule (et peut-être moi par-dessus histoire de mettre un peu de poids à mes arguments).

Je parle de cet incident à mon médecin attitré en lui précisant que s’il recommençait, tous mes neurones seraient à l’affut et qu’il n’aurait pas de 2ème chance. Je devait retomber sur lui quelques jours, il a reçu le message, n’est pas venu et ça arrangeait tout le monde.

Puis vint le moment de « puisque ça va, on va envisager une sortie ? ». Et là ton cerveau est très partagé. Ca oscille entre la joie de sortir et le « comment c’est le monde dehors ? ». Car en un mois, tu oublies. Les permissions que j’avaient étaient pour aller faire des mariages, je n’ai donc pas eu le temps de voir le reste du monde.

La dernière semaine passe vite. Trop vite. Plus la date finale approche, plus le stress monte. Le jour de la sortie arrive, tout se passe très vite et je m’aperçois que j’ai oublié de dire « au revoir » à plein de gens sympas ; limite la sortie comme un voleur.

Le retour à la réalité est dur. Je suis encore en mode « ours » et j’ais du mal à affronter le monde.

Je pars pour de vraies vacances, voir des amis et bosser enfin sur mon camion. C’est parfois dur alors je m’isole en espérant que ça passe inaperçu.

Aujourd’hui, Dimanche 25 juillet, ça fait 9 jours que je suis sorti. La dose de médocs est réduite ce qui est pas mal vu les 6 ans passés à prendre tout ces poisons. La dépression est encore sous-jacente, j’arrive à gérer le peu que j’ai à gérer mais putain que c’est difficile.

Si tout se passe bien, je vais passer un mois tranquille entre l’aménagement de mon camion et de la rando avec le plus grand de mes gamins pour aller tâter de la montagne.

Alors voilà la fin, chère lectrice, cher lecteur. Si tu es en train de lire cette ligne, ça suppose que tu t’es bouffé tout le texte alors je te dit BRAVO.

Inutile toutefois de s’épancher sur mes états d’âmes et mes soucis ; ça se passe entre mon conscient, mon subconscient et mon inconscient. J’accepte plus volontiers les critiques littéraires (si on peut appeler ça de l’écriture) ou les commentaires si tu es dans la même situation et que ce texte t’a permis de t’évader un peu ou de voir qu’il existe des gens qui ont les mêmes maux que toi et que tu n’es pas tout seul. Il existe des structures et tout un tas de gens prêts à t’aider, profites-en.

A la lecture de ce texte, j’espère que tu as aussi compris que tous les médicaments « qui font du bien » ne sont en fait que de vrais poisons et des leurres qui ne font que masquer la réalité qui elle, quand elle te rejoint, te tombe sur la gueule et te colle par terre. Evite le médoc qui est une fausse solution de facilité et qui te pourri la vie avant que tu t’en rendes compte. J’en sors petit à petit mais ça va être long et chiant (ou l’inverse).
Excuses les fautes, mais après quelques correction, j’arrive de moins en moins à relire ce texte.
A mes amis ou mes connaissances de plus ou moins longue date, je pense que se texte te permettra de comprendre pourquoi parfois je m’isole dans un coin ou que je semble ailleurs ; c’est pas par dédain mais par besoin.

Vous pouvez reprendre une activité normale ; merci de votre lecture.

Christophe.